MANO SOLO, un homme en harmonie

Après la parenthèse punk de Frère Misère, les années de dessins et de peintures et l'écriture d'un roman, quelle que soit la forme qu'il puisse prendre, Mano Solo poursuit avec le même désir d'urgence son parcours artistique.
photo Mano Que représente pour vous l'expérience de la scène ?
Le public m'a tout donné. Je lui donne autant. Il n'y a pas plus ni moins d'émotion qu'il y a quelques années. Il s'est toujours passé quelque chose dans mes concerts, une émotion particulière. Jamais la même de soir en soir. Je flippais un peu pour ce disque. Il est enregistré en public, mais en fait c'est comme un autre disque. Un témoignage, une étape avant de passer à autre chose.

Après avoir vécu pleinement les années punk, quel regard portez-vous sur cette époque ?
Une connerie. Ces années ont été très stériles en fait. Musicalement, elles représentent de bonnes années. J'ai encore du plaisir à écouter certains groupes comme Green Day. C'est vraiment la caricature de ces années-là. mais aujourd'hui les mômes sont plus désespérés qu'on l'était à l'époque. La crise est plus profonde maintenant. Finalement, les jeunes sont plus dans le no future à l'heure actuelle. La musique importe peu finalement. C'est le contenu qui importe.

L'époque où vous dessiniez est-elle révolue ?
J'ai trouvé avec la chanson une forme qui me convient. La peinture c'est beaucoup de temps. Il faut faire que ça si tu veux avancer. Il faut faire des tableaux qui soient habités. C'est ça que les gens ressentent.

C'est une recherche d'authenticité constante ?
C'est ça. L'importance c'est la foi, l'authenticité. Ca n'empêche pas les gadins. Mais c'est ça qui fait le différence entre un artiste et un faiseur. Avec mon roman, c'est plus souterrain. Le bouquin est passé un peu inaperçu. Les critiques littéraires n'ent ont pas parlé. C'est trop cloisonné dans ce milieu-là. Ou alors les mecs n'ont pas osé me dire que c'était pas bon. Mais ça existe. J'en vends peu, mais tout le temps. C'est constant. Ca m'importe peu. Ce bouquin, je l'ai fait comme j'écris une chanson, instinctivement, avec juste des atmosphères en tête, sans faire de "style". C'est ce que je recherche. Je les retrouve chez Jarmush, qui est un vrai cinéaste d'ambiance.

Quelle définition donneriez-vous de l'amour ?
C'est comme une religion. c'est fait pour que les hommes ne se dévorent pas trop entre eux. Ca n'existe pas, mais on en a besoin, sinon ce serait l'enfer. On peut y mettre ce qu'on veut: Dieu, amour, ce sont des choses immuables. Les valeurs suprêmes. On ne parle que de ça en fait. Jamais assez. Jamais assez bien.

Etes-vous parfois en paix avec vous-même ?
C'est sur scène que ça se passe. Des instants privilégiés. Tous les chanteurs le savent. Je me sens poussé dans ces moments-là.


Propos receuillis par Benoît Laudier
Encore n°12 Janvier 1998